Murs étroits, proposition dense. Une quinzaine d’artistes publié-e-s par Frémok dévoilent leurs originaux, livrant un bel aperçu du catalogue de cette “plate-forme” éditoriale belgo-française. Vernissage de l’exposition assorti d’une rencontre avec Yvan Alagbé, auteur et éditeur protéiforme : samedi 18 octobre.
Un peu d’histoire. Au début étaient deux maisons d’édition : Amok, fondée en 1994 à Montreuil par Yvan Alagbé et Oliver Marboeuf, et Fréon, créée à Bruxelles en 1997 par un collectif d’artistes dont Thierry Van Hasselt, Vincent Fortemps, Olivier Deprez, Jean-Christophe Long. En 2002, convaincues de leur compatibilité artistique (lisez le traité du Frémok), les deux structures opèrent un rapprochement associatif et sémantique.
“Le Frémok n’est pas une (et n’a pas de) maison. C’est la raison pour laquelle le terme de plate-forme est préféré. Sous le label FRMK, le Frémok publie des ouvrages de littératures graphiques qui vont de la bande dessinée à la poésie visuelle. Il réalise ou participe également à des livres chez d’autres éditeurs. Par ailleurs, son champ d’action excède le domaine du livre pour se porter vers le spectacle, la performance, l’événement, l’installation, ou encore la formation”.
Le comité artistique réunit aujourd’hui Yvan Alagbé, Paz Boïra, Frédéric Coché, Olivier Deprez, Vincent Fortemps, Dominique Goblet, Éric Lambé, Jean-Christophe Long, Michaël Matthys et Thierry Van Hasselt.
Une proposition émanant d’auteurs bien décidés à ne pas brider leur art se distingue forcément de l’ordinaire éditorial. Pour aller vite, on amalgame FRMK à de la “bande dessinée expérimentale” ou de la “bande dessinée contemporaine”, comme on parlerait de façon un peu sceptique de l’art contemporain. Car ces termes ont souvent pour effet de maintenir les lecteurs à distance : expérimental vaudrait pour intello, pour élitiste.
On trouve pourtant des gros nez chez Frémok, de l’humour potache, de l’aventure, de l’érotisme, des tas de choses qu’on trouve ailleurs sous une forme plus convenue, plus corsetée. Ici, on croit en la curiosité du lecteur. On l’incite à suivre les traces de l’artiste plutôt que soumettre celui-ci aux poncifs formels hors desquels l’industrie de la bande dessinée est persuadée qu’il n’y a pas d’accroche possible.
Yvan Alagbé change plus souvent de pseudonymes qu’il ne fait de livres. Professeur A, général G, et pourquoi pas simultanément, Hyacinthe Galbet, d’autres encore peut-être selon le jour, le projet, l’envie de brouiller les pistes.
Traducteur, directeur de la collection Le signe noir chez un autre éditeur, Rackham, il enfile parfois la cagoule en latex de Démoniak.
Artiste attentif à l’état du monde, il explore au lavis le post-colonialisme, le racisme ordinaire, aussi les enlacements et les tourments familiaux. À lire ici : une chronique d’École de la misère, un des grands livres de 2013.
Sur les cimaises :
Yvan Alagbé
Olivier Deprez et Adolpho Avril
Kamagurka et Herr Seele
Thierry Van Hasselt