Cet été sur les murs de Contrebandes, des cartes à gratter de Matthias Lehmann, Marcel Ruijters, Matti Hagelberg, Emre Orhun et Gwen Tomahawk. Une proposition sombre et belle du Dernier cri. Décrochage vendredi 30 août.
En dessinant, on ajoute de la matière à une page blanche. Le pinceau, la mine y déposent de l’encre ou des résidus carbonés, le trait assombrit le fond.
On peut aussi envisager l’opération inverse : révéler une image en retirant de la matière à une page noire, gratter avec une lame pour faire apparaître le blanc sous-jacent. C’est le principe de la carte à gratter.
La technique n’est pas récente, cousine de la gravure sur bois, elle confère aux œuvres les plus contemporaines un aspect antique, parfaitement adapté par exemple aux évocations gothiques et médiévales de Marcel Ruijters.
Du noir et du blanc : si besoin, les trames de gris se composeront par hachures. Certains tentent aussi des insertions de couleur, comme Matthias Lehmann, colorisent leurs planches pour publication ou reproduction en estampes, comme Matti Hagelberg.
C’est surtout le travail radical du noir qui fascine les artistes pour qui cette forme d’expression surclasse les autres, laissant peu de place à l’erreur, à la retouche, accordée à l’humour noir, la satire sociale et les outrances provocatrices, sombres et ricanantes comme les squelettes de Posada peuvent l’être.
Certaines planches indisposeront certains passants, alors on réservera l’exposition à un public averti. Elle a d’abord été montée à la Friche de la Belle de Mai dans le cadre du Mauvais œil sur 2013, une manifestation qui célèbre tout au long de l’année le vingtième anniversaire du Dernier cri.
Matti Hagelberg est finlandais. Un des rares auteurs nordiques de bandes dessinées à être publiés en France, essentiellement à l’Association (Holmmenkollen, Kekkonen, Hard west). Le plus graphique des artistes exposés, ses travaux naviguent entre cartoon et raideurs signalétiques.
Matthias Lehmann est français. Vous avez déjà certainement croisé ses grattages dans la presse (Le Monde, Libé, XXI, Siné mensuel, etc.), il fait aussi de la bande dessinée : deux livres publiés chez Actes sud, L’étouffeur de la RN 115 et Les larmes d’Ezechiel, aussi une patte de mouche à l’Association, Isolacity.
Emre Ohrun est turc, né en Chine, lyonnais d’adoption. Diplômé d’Émile Kohl, il illustre des livres jeunesse (Actes sud, Albin Michel, Sarbacane…), a réalisé avec Cédric Rassat deux bandes dessinées éditées par Glénat (La malédiction du Titanic et Erzsebet). Dernier ouvrage paru : Les vies imaginaires au Dernier cri.
Marcel Ruijters est hollandais. Il dirige le magazine Zone 5300. En France, on connaît sa fascination pour le Moyen âge depuis Sine qua non (Actes sud / L’An 2) et 1348 (Le Dernier cri). Il vient d’adapter un passage de la Divine comédie de Dante : Inferno, aux éditions The Hoochie coochie.
Gwen Tomahawk réside à Montreuil, exécute des pochettes de disques de groupes underground, a réalisé les illustrations d’un livre consacré à Claire Denis (Claire Denis, cinéaste à part, et entière… de Cédric Mal, éditions de Verneuil). Il a récemment retrouvé les Crados d’Art Spieglman : devenus adultes mais pas assagis, ils se font désormais appeler Los trashos (boîte à images sérigraphiées, le Dernier cri).