Une exposition à partir du 22 juillet sur les murs de Contrebandes, un livre publié aux éditions de la Nerthe. Utopies, épuisements, rémanences. “Les choses sans images échappent à la mémoire”.

Comment les lieux habitent-ils les êtres ?

Comment les paysages habitent-ils le peintre ?

Il n’y a pas de paysage naturel”, écrit Liron, “il n’y a au dehors aucun paysage qui attendrait qu’on vienne le contempler. Le paysage n’est qu’une façon de voir”. Et : “on nomme lieu un espace épaissi de ce que chacun y projette. Aucun lieu n’existe avant que l’on en porte l’idée”.

Il fait métier de la contemplation, cette “manière d’oisif”. Un goût pour le vide, ce qui reste — ou pas. “J’ai ce tempérament : que je ne sens que les absences et ne vois dans chaque chose que le mouvement d’échappée qu’elles imposent, si bien que je les regarde comme des souvenirs. Toujours quelque chose d’à demi effacé ou lointain. Tu me diras que c’est mon travers négatif, cette forme de pessimisme ou de mélancolie qui définit ma sensibilité. N’a-t-on pas assez généralement cette attitude, à prendre des photos continuellement de ce que l’on ne prend qu’à peine le temps de voir ?”.

Sur l’œuvre picturale, dont les visiteurs de l’Hôtel des Arts ont pu avoir un bel aperçu en 2011, Gilles Altieri écrit ceci :

L’intérêt porté par Jérémy Liron aux paysages urbains trouve une source plus immédiate chez Giorgio Morandi à la fois pour le regard que celui-ci porte à des sujets ordinaires et sans qualité […], ainsi que pour la passion manifestée par le maître de Bologne à l’égard de la géométrie. Sur ce point la peinture de Liron par les cadrages qu’il adopte, alterne les vues banales et les compositions extrêmement sophistiquées qui approche la pure abstraction. La référence à Edward Hopper s’impose aussi par sa description de vues urbaines américaines” (extrait de Jérémy Liron, peintre en bâtiments, introduction du catalogue de l’artiste à l’Hôtel des Arts – Toulon, en 2011).

La Nerthe publie un texte livré à l’occasion d’une résidence à Caromb, dans le Vaucluse, entre février et juillet 2013. Invité par l’association Éclats à  travailler sur la notion d’hétérotopies qui, “contre-espaces” selon Foucault, seraient les lieux des utopies réalisées, Jérémy Liron y développe par fragments une pensée contemplative et introspective. “On fait travailler le monde en soi, c’est ça être au monde”.

Trouver un titre qui fasse mouvement : La mer, en contrebas, tape contre la digue.

Mieux :

la mer,

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contre la

digue.

Pour que le mouvement jaillisse des mots comme l’eau vole en éclats sur les rochers.

Car le mouvement est ce lien, tendu entre l’espace et le temps, qui obsède dessinateurs et peintres tenus de le rompre en figeant l’instant et l’objet sur une toile ou la feuille d’un carnet. “On pourra rêver que le mouvement, atteignant je ne sais quelle forme de perfection, s’y stabilise en une sereine immobilité”.

Jérémy Liron expose à Contrebandes, à partir du 22 juillet, un choix de travaux réalisés sur papier. Ce même jour : vernissage et présentation de La mer, en contrebas… en compagnie de l’auteur et de l’éditeur Philippe Blanchon.

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Jérémy Liron