Contrebandes vous fait découvrir l’activité cachée du libraire en levant le voile sur un maillon de la chaîne du livre : le distributeur.

Un maillon fort qui répartit les bouquins dans les librairies de l’Hexagone. Un maillon faible également, parce qu’il envisage trop souvent les livres comme s’il s’agissait de poireaux (n’en déplaise aux associations de protection des légumes sans défense).

Le distributeur fait payer à l’éditeur le stockage et la manutention des livres. Le libraire prend à sa charge le transport des ouvrages depuis l’entrepôt du distributeur (via un transporteur) et, plus tard, le retour éventuel des invendus vers l’entrepôt de départ.

On imagine sans peine des hangars mal chauffés, l’huile par terre, la valse des transpalettes, la poussière, de rares employés précaires et sous-payés.

Contrebandes ne commande pas beaucoup d’exemplaires de chaque titre, l’unité est fréquente. Un jour, à l’ouverture d’un carton Hachette, nous découvrîmes avec stupeur une trace de pied sur le livre du haut. Chaussure de sport, taille 42 selon nos experts.

Autres choses reçues : un carton de 30 litres pour une dizaine de bandeaux promotionnels ; un colis composé de plusieurs exemplaires d’un bouquin super drôle compilant des faux SMS de Sarkozy que l’éditeur nous demandait de placer illico sur les rayons parce qu’on allait en vendre autant que du Harry Potter ou un truc du genre alors qu’on ne lui avait rien demandé, mais alors rien du tout. Etc.

Après la trêve des confiseurs, mardi 13 janvier, Hachette a inauguré la valse des cartons. Dans ce premier colis reçu par Contrebandes en 2009, trois exemplaires du deuxième tome des Notes de Boulet (Delcourt). Une nouveauté toute chaude.

Premier exemplaire :

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Deuxième exemplaire :

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Le troisième exemplaire a pu être placé sur les rayonnages.

Un autre carton, distribué cette fois-ci par UD (groupe Flammarion), contenait un tome du Cri du peuple de Tardi et Vautrin, titre déjà ancien dont nous souhaitions un seul exemplaire pour réassortir la série.

Il semble normal et sain pour la planète qu’un ouvrage invendu, retourné au distributeur par la librairie X, soit stocké en attendant d’être commandé par la librairie Y. Encore faut-il que le livre, à défaut d’être neuf, soit impeccable. Voilà :

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Notez la petite étiquette blanche collée sans doute par le libraire X avant le retour :

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Cette étiquette a pour but d’aviser le réceptionnaire : l’exemplaire présente un défaut, il a été relié à l’envers. Autrement dit : je te le renvoie sinon je ne serai pas remboursé, mais attention, il faut le sortir du circuit !

Qu’à cela ne tienne. Le distributeur a soigneusement (?) entreposé le livre avec sa petite étiquette dessus. C’est marrant, ça, quand on sait le nombre de livres joyeusement pilonnés par les mêmes personnes chaque année. Pas ce livre-là. Il dormait sur son étagère jusqu’à ce qu’on nous l’expédie.

Nous renverrons (à nos frais, donc) ce machin au distributeur en laissant l’étiquette en vue. Un nouvel exemplaire est déjà commandé, croisons les doigts. Pendant ce temps, les camions roulent en file indienne sur l’autoroute.